Yara
et Thaïs sont parties ce matin à Londres. Tôt levés pour aller gare du Nord
prendre l’Eurostar, RER un peu en retard, la rampe d’accès à l’Eurostar.
Beaucoup de souvenirs attachés à cette gare…
La
mémoire des trains à vapeur, quand on allait à Compiègne retrouver la famille,
les cousins cousines, oncles et tantes et ma grand mère Germaine. Je me
souviens de ma vision d’enfant à la fenêtre du train en passant la gare de St
Denis. Cette gare avant Paris, on y faisait halte avec le train de banlieue.
Arrêt, les voyageurs montrent, je suis un élément de la foule qui vit dans les
trains de banlieue. Mais, une heure après c’était autre chose… On repassait
avec le train rapide à 120 km/h en laissant tous les voyageurs sur le quai. Et
je regardais alors la gare avec le sentiment d’avoir la puissance de la vapeur,
appelé vers une autre destination que la banlieue. Le sentiment d’être appelé
vers une autre destination ne m’a jamais vraiment quitté…
On
allait aussi à Reims visiter Jules et Fernande (une cousine de maman), on arrivait
par le train de banlieue Ermont Paris et on sortait de la gare pour rejoindre à
pied la gare de l’Est. 5 minutes de marche, je donnais la main à mes parents et
j’étais heureux de prendre un nouveau train rapide… Les wagons avaient encore
des photos de paysage en noir en blanc et la fameuse mention qui conseillait de
ne pas se pencher aux fenêtres. Avec les années, papa a acquis le droit de
voyager en première classe et nous aussi… J’aimais encore plus les fauteuils
rembourrés des premières classes… Quelle nostalgie aujourd’hui quand je prends
les trains du Kazakhstan… En moins bon état que les wagons des années 60 en
France… Mais Jules et Fernande ont disparu, les cousins et cousines ont grandi,
papa a acheté une voiture et je ne suis plus allé à Compiègne ni à Reims, j’ai
plutôt pris la direction de Rennes, dès 1972 pour commencer l’université. Je
crois me souvenir avoir encore pris des trains tractés à la vapeur à cette
date… Je vérifierai ! Mais je n’ai pas fait d’infidélité à la gare du
Nord, je retournais voir papa et maman domiciliés à Mitry Claye…
Je
me rappelle aussi les cours de guitare que je prenais dans la cantine qui était
située à coté de la gare. Je venais de Sannois chaque jeudi après midi. Mon
professeur était contracté par la SNCF, c’était un guitariste de jazz qui m’a
appris les bases : « le ciel, le soleil et la mer », « la
mer » de Charles Trenet furent les premiers morceaux que j’appris à jouer.
J’adorais l’ambiance des cours, on était une dizaine d’élèves. Et le fait de
prendre le train de banlieue chaque semaine… C’est dans cette même salle que
nous avions fêté le départ en retraite de papa. Ca devait être en 1982,
Sylvestre cavalait dans la salle. Papa a une série de photos de cette
cérémonie. Il avait un look encore très jeune, ainsi que maman. Papa avait à
peu près mon âge lorsqu’il est parti en retraite (j’ai du mal à réaliser ce que
cela signifierait pour moi si tel était mon cas). Ce passage a été difficile
pour lui car il se sentait encore en possession de tous ses moyens… Mais la
pression sociale était forte pour que les agents ne fassent pas de
« rabiot » !
J’ai
aussi les souvenirs des Thalis que j’ai empruntés quand j’allais à Bruxelles
pour les projets européens du BRGM. Que du plaisir aussi. Et toujours le même
sentiment de puissance quand le train passait à la gare de St Denis.Ces
souvenirs me sont revenus en regardant la gare du Nord au petit matin… En
rentrant chez papa, avant de prendre la direction de l’aéroport, je me suis
connecté et ai appris le décès de Jean Louis Feybesse. Le crabe a eu raison de
lui. On avait commencé notre carrière au BRGM à un mois d’écart : moi le
15 mars, lui le 15 avril 1982. Et on a quitté le BRGM pour AREVA à un mois d’écart,
moi le 1er juin, lui le 1er juillet 2008. Beaucoup
d’heures passés ensemble en Afrique, dans le Massif central, peu de contacts en
dehors du travail mais beaucoup d’estime et de respect mutuel. Avec Jean
Pierre, on surnommait Jean Louis « l’horloger » à cause de sa
précision d’analyse des schistosités. Cher Jean Louis, tu as longtemps été si
près de nous que ton départ laisse un trou terrible, on a du mal à imaginer que
tu ne seras plus près de nous pour discuter de tectonique... et de la vie...